Les Nazaréens commencent par admirer la sagesse de Jésus. Mais Lui débusque l’ambigüité de leur attitude : ils ne sont pas prêts à partager les bienfaits de leur « guérisseur » avec des étrangers ! En clair, ils veulent mettre la main sur Lui. C’est d’ailleurs ce qu’ils font brutalement, passant de la bienveillance à la fureur jusqu’à tenter de le tuer. Mais Jésus fend la foule et continue sa route, enseignant et soulageant les malades, jusqu’à l’Heure de sa Passion à Jérusalem. Alors, après L’avoir acclamé comme Fils de David, une autre foule se retournera contre Lui et cette fois il en mourra. Cependant, Jésus vaincra la mort, et offrira à tout homme la même liberté sur les puissances du Mal. Ayant envoyé ses disciples achever sa mission, Il continuera sa route vers le cœur de son Père, sa Patrie originelle où Il nous attend.

« Du fond du cœur. » Jésus nous indique le lieu par où commencer : par les profondeurs. Au lieu d’où tout peut naître : tout au fond du cœur. C’est là que nous sommes attendus en ce temps du carême, là où le Père, présent dans le secret, crée en nous un cœur pur. Et c’est du fond du cœur que notre Père du ciel nous appelle à pardonner. Oui, le véritable pardon ne peut venir que de ce fond du cœur humain où l’amour de Dieu lui-même a été répandu par l’Esprit-Saint. Là, il n’y a plus ni calcul, ni règlement de compte, ni donnant-donnant, mais un amour qui veut jaillir à profusion. De son cœur compatissant et dans un amour fou, le roi de notre parabole remet tout. Du fond de son cœur de chair, Dieu, en son Fils, nous ouvre la voie. Il nous pardonne à l’infini, jusque dans nos profondeurs !

Cette parole de Jésus décevra sans doute ceux qui pensaient s’en tirer à bon compte avec les rigueurs de la Loi mosaïque ! Jésus, qui fait ostensiblement des guérisons les jours de sabbat, mange avec les publicains et fustige scribes et pharisiens, serait-Il plus légaliste qu’eux ?  Non, sans doute, mais II précise clairement qu’Il ne supprime pas la Loi. Il la récapitule et l’accomplit en sa personne. Lui-même, le Fils de Dieu, est la Loi. Cette Loi nouvelle, dont parle le seul commandement, est l’amour et elle porte à leur achèvement la parole des prophètes et l’héritage reçu par le peuple élu. Inscrite en nos cœurs, elle nous place à la suite du Christ, sur le chemin exigeant de la liberté, pour l’avènement du Royaume inauguré par notre Maître et Seigneur. Joie du disciple qui laisse jaillir, jour après jour, la vérité profonde de son être.

Jésus affirme que la division est proprement diabolique ! Celle-ci peut être grossière, comme les guerres menées au vu et au su de tous. Mais il y a aussi les guerres larvées, les conflits cachés, les divisions subtiles et sournoises ; les paroles qui tuent, lâchées par-ci par-là, telles des bombes à fragmentation, dont les effets ne finissent pas de se répercuter. Un psaume, parmi bien d’autres, parle de ceux qui disent « Armons notre langue »… On peut même diviser sans paroles, fusiller du regard . Et puis, il y a encore les non-dits terrifiants, les mutismes meurtriers, les enfermements infernaux. Si la division nourrit la division, luttons contre elle, en multipliant ce qui unit. Controns la prolifération du mal, par la puissance du bien qui engendre le bien. Les armes se tairont-elles enfin ?

« Loi - commandement » ! Ces mots n’ont pas bonne presse aujourd’hui. Pourtant, dans le psaume 118,3, nous disons : « Ouvre mes yeux, Seigneur, que je contemple les merveilles de ta loi ». La loi de Dieu est la seule qui nous dise : « Aime ! ». Aime de tout ton cœur, de toutes tes forces, de toute ton âme. Qui peut y parvenir sans laisser d’abord l’amour suprême l’envahir ? Ce commandement est une invitation à laisser son amour prendre possession de nous-mêmes. Malgré notre fragilité, malgré nos lâchetés, malgré notre petitesse, Dieu nous aime. Il nous a aimés par le don de toute sa vie. Accordons, dès maintenant, notre foi à la réalité de cet amour. Et nous pourrons dire, comme Saint Augustin : « Aime et fais ce que tu veux ».

Justement si : je suis comme les autres hommes. Je suis créé, pécheur, sauvé, destiné à la gloire et à l’infini bonheur de voir Dieu. Peut-on trouver mieux ? Et cependant, tout être humain est tenté par la comparaison, soit pour s’enfler comme notre pharisien – qui, de plus, met Dieu de son côté – soit pour se déprécier, ce qui revient au même. Dans les deux cas, on est centré sur soi. Or, il suffit de déplacer son regard pour que tout se mette en place : regarder Dieu et la merveille qu’Il a faite en créant et sauvant l’homme, tout homme et tout l’homme. Voilà de quoi captiver notre intelligence et notre cœur, beaucoup plus que de détailler au microscope ce qui nous différencie des autres. Et si  un regard de côté nous arrive encore, c’est l’occasion de rire de nous-même et de rectifier le tir en regardant la beauté de notre frère.

Nicodème vient voir Jésus en pleine nuit. Il aurait pu choisir un autre moment ! Il a besoin d’y voir clair. Pas facile dans l’obscurité de la nuit ! Il nous ressemble un peu ce Nicodème ! Il cherche car il a besoin de comprendre. Et il n’a pas peur de s’approcher de Jésus, de le questionner. Jésus, qui est lumière, va l’éclairer et répondre à ses interrogations. Mais surtout, il va l’inviter à croire en lui, le Fils unique du Père. Il lui révèle que Dieu est Amour, qu’il veut nous sauver et nous donner la vie éternelle. Pour cela, une seule chose est nécessaire : la foi ! En ce dimanche de Laetere, dimanche de la joie, demandons au Christ, mort et ressuscité, de faire grandir notre foi et notre espérance en lui. Laissons-le guider nos pas, il est le GPS de notre vie chrétienne, il nous conduira à la bonne destination : la Vie éternelle.